Littérature orale et arts de la scène

L’art est créé par l’artiste mais réceptionné par le spectateur qui grâce à sa perception unique donne à l’œuvre un sens qui est toujours à redécouvrir. L’œuvre est produite pour être écoutée, interprétée. Mais le spectateur est-il toujours actif dans cette réception ? L’art tient-il compte de ses gouts ? Qu’en est-il par exemple du théâtre ? Il n’est pas certain qu’il y ait toujours une adaptation des spectacles au gout du public jeune ni de temps consacré à la réception de ses spectacles. L’enseignant cherche souvent à faire passer les élèves d’un rapport ordinaire ou éthique vers une analyse savante et esthétique des productions culturelles. Il cherche à répondre à des objectifs didactiques qui sont parfois éloignés de l’approche sensible à l’art. Un projet théâtral met toujours en lien les intentions d’un auteur-metteur en scène, des traces tangibles lors de la représentation et l’interprétation de ces traces par les spectateurs. « Il y a bien ici au sens de Jauss un horizon d’attente de l’œuvre auquel le spectateur va confronter son propre horizon d’attente » (Richard-Bossez et al., 2017). Des travaux portent sur la réception du théâtre par le jeune public (ibid.). Une des particularités du jeune public est une forte extériorisation de ses réactions verbales et non verbales. Pour préparer ce jeune, un temps d’accueil lui est parfois réservé dans le lieu de la représentation avec l’équipe du théâtre pour créer des conditions favorables à la réception des œuvres, par exemple en présentant les codes du théâtre, les conditions matérielles (lumière tamisée) ou en désamorçant des sources de malentendus. Pendant le spectacle, la prégnance des perceptions sensorielles dans le mode d’appréhension de ce qui est offert sur scène, ainsi que l’expression des émotions (peur, inquiétude) et des sentiments (« c’est beau »), les réactions face au registre de langue ou à l’humour, frappent l’observateur. Les lieux de spectacle permettent parfois, en fin de représentation, des échanges entre les spectateurs et les acteurs, metteurs en scène et personnel du spectacle. C’est souvent le moment où s’expriment des questionnements relatifs aux choix de l’auteur ou à la mise en scène. Ces échanges se poursuivent avec les autres spectateurs et les adultes accompagnateurs. Ils témoignent de la volonté de partager des impressions sur le champ et participent à la réception du spectacle. Cependant ces manifestations d’intérêt et interactions sont fortement régulées par les adultes présents. Les prolongements dans les écoles sont essentiellement faits sous forme de discussion qui donnent lieu à une production de texte qui « scolarise » le spectacle pour « vérifier que le message » a été perçu, et tend parfois à effacer l’expérience esthétique par une expérience éducative.
L’art contemporain ouvre la possibilité d’une intervention possible du spectateur dans l’œuvre susceptible de le rapprocher de celle-ci.